vendredi 10 décembre 2010

la Dame Verte de Noël

La Franche-Comté, possède le précieux  privilège d'être la région du monde qui connaît le plus grand nombre de Fées de Noël. Leur reine reste sans conteste Tante Arie mais à sa suite tintinnabulent Trotte-Vieilles, Chauchepaille, Berthe la Fileuse, Mère Clochette et... la Dame Verte !


Fées à l'allure d'épicéa, les Dames Vertes, solitaires ou en groupe, occuppent une place majeure dans la mythologie populaire du Pays Comtois. Avant la désastreuse colonisation de Noël par le gros bonhomme rouge à barbe blanche, la Dame Verte se chargeait de la distribution des cadeaux dans certains coins du Jura. A Poligny,  elle ne sort plus la nuit du 24 décembre comme autrefois et reste calfeutrée dans sa grotte à ressasser, avec une douce nostalgie; les souvenirs de sa grandeur passée.

Dans le Haut-Doubs, dans la région de Pontarlier, la Dame Verte était, jadis,  associée à une singulière coutume. Cela s'appelait " battre la tronche".
Le soir  magique, dans chaque famille, on préparait la tronche de Noël. Une grosse bûche creuse que l'on garnissait de friandises (fruits secs, gâteaux, dragées...) puis que l'on "déguisait" en la recouvrant d'un tapis ou d'une peau de mouton. Auguste Demesmay rapporte dans ses "Traditions populaires de Franche-Comté" que son grand-père donnait à cette fête une grande solennité. Bien des jours avant, il montrait à ses petits-enfants la tronche debout comme une divinité païenne au fond de sa cour.
Le fameux soir, lorsque le "tronc enchanté" se trouvait  bien installé, les enfants se voyaient invités à le frapper, armés de grands bâtons. L'enjeu consistait à contraindre la tronche à livrer ses trésors.

Souvent, on levait une première fois le tapis de la bûche magique sans rien découvrir à l'intérieur. Les gamins se voyaient alors reprochés leurs bêtises de l'année écoulée; causes évidentes  de la méchante humeur de la Dame Verte et de la stérilité de la tronche ! Les parents  envoyaient alors la marmaille se repentir dans une chambre voisine, le temps pour eux de remplir pour de bon  cette bûche d'abondance. A la seconde tentative, après une nouvelle danse des grands bâtons, la tronche livrait, enfin,  ses cadeaux.


L'amateur de folklore sera sans doute intéressé de savoir que cette vieille coutume comtoise a une cousine encore bien vivace en Catalogne. Si  en Comté, battre la tronche consistait à la faire suer ou pisser de façon à lui faire donner ses cadeaux; dans cette région d'Espagne on connaît la coutume "el cago tio" où il s'agit de faire chier une bûche de Noël.
Ces bûches sont souvent vendues sur les marchés de Noël, décorées avec quatre pattes, avec un visage peint et coiffées du béret rouge catalan. Tronche de Noël  et Tio de Nadal sont véritablement jumelles. Ainsi, les enfants de Catalogne frappent la bûche en chantant une chansonnette traditionnelle pour qu'elle leur offre des sucreries.
Tió de nadal

En voyant l'enthousiasme des gamins catalans, on aimerait rêver que notre coutume franc-comtoise de la tronche de Noël puisse renaître de ses cendres...

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